Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
La Rose d'Airain
15 avril 2008

Chapitre 1 : Weekend a Rome sans Rome.

 

“FUUUUUUUCK”

The Invisibles. Grant Morrison.

 

Traversant le nuage de fumée de clope à l'odeur finalement familière, le jeune homme roux rentra en pestant dans le préau couvert. L’hiver était particulièrement rigoureux cette année, et a présent le jeune homme était prêt a tout pour provoquer le réchauffement planétaire. Mais il ne pouvait rien faire, tant pis. C'était sa façon de penser, à Raoul. Avec un nom pareil, « Raaaaaooouuulleeuh », il n'était pas des plus social, bien trop souvent sujet de brimades sur son nom. Y’en a qui s’amuse de peu, tant mieux pour eux, mais Raoul avait du coup préféré son petit monde a lui. Un passé chargé vous façonne à ce genre de comportement, et même si il n’était pas le plus malheureux, il était encore seul juge de ce qu'il estimait supportable. Pour lui et pour ses amis. Raoul n’était pas banal, et se vautrait allègrement dans son anormalité avec un certain plaisir, surtout depuis la fin du collège et surtout, depuis qu’il avait 18 ans. Roux donc, cheveux court, fringué large et d'un rouge vif qui s'accordait parfaitement avec son nez enrhumé posé au milieu de son visage long un peu carré, entre deux yeux large et vert. La foule pressé devant le lycée fumait, comme une usine a bruit et a rire. Les regards se tournaient sur son passage. Au collège, Raoul provoquait les rires de ses « camarades », mais a présent, il était une présence gênante, dérangeante pour les autres. Il avait le sentiment de devoir leur rappeler que des gens comme lui existent, qu’ils ne vivent pas dans un monde d’ignorant abreuvé de télé mais qu’il existe aussi des gens qui lisent et qui pensent par eux même. Il adorait ça. Il traversa la préau et grimpa les quatre marches qui le séparait de la "bande de jeunes" avec qui il "traînait", au dire de ses parents. Ils était installés sur une sorte de palier avant le premier étage du lycée. Ils surplombait le reste des gens massé sous le préau en quête de chaleur. Eux, ils avaient un radiateur.

-Salut, dit il de sa voix un peu enrouée.

-Salut collège

-Salut.

-dérangeante

-Salut.

La bande était d’accord, ils étaient asociaux, mais leur petit cercle valait bien mieux qu’une chaîne de dix mille personne se connaissant par SMS. Ça leur fait un point commun et un sujet de discussion. La "bande" de Raoul lui plaisait bien. Il salua Eve, une fille de hippie qui avait rejeté cette idéologie comme toutes ado rejette ses parents. Elle s'était construite un personnage de craquette violente et inébranlable, blonde à faire mal aux yeux, elle criait et affichait un anti-américanisme qui saoulait même ses potes. Et elle avait un « tatouage », une boule a pic noire en bas du dos. Ça faisait scandale à la piscine. Il fit la bise a Emilie, grande brune un brin lunatique. Malgré sa passion pour les animaux, les chat tout particulièrement et son caractère tendre, elle éprouvait un grande joie a visionner des heure de snuff movies et autre atrocité du genre humain genre perceuse dans le trou de la bite. Elle disait préférer les animaux aux hommes, qui se font trop de souci pour rien. Il salua Nicolas. Nicolas était parfait. Beau, grand, fort, intelligent et doué d'un talent artistique et créatif sans égal. Cette perfection avait fait de lui un exclu, en tant que rival potentiel de tout le monde. Il était blond, grand et large, une statue grecque en poncho « équitable ».Calme et réfléchi, il calmait souvent les ardeurs du groupe, créant pas mal de déception mais la bande lui devait beaucoup tout de même. Enfin, Raoul salua Sophie. C’était une petite rousse, toujours prête a rigoler, sérieuse mais n'hésitant jamais sur une occasion de s'amuser. Quoi de plus normal, si c'est sans prendre en compte sa fâcheuse tendance à ruiner la vie des gens. Pas quelle soit méchante, mais, et ce fut prouvé plus d'une fois, par les victimes notamment : elle porte la poisse. Croyez le ou non était sa devise, et malheureusement elle rajoutait « Je vous avait prévenus ». Heureusement, elle était canon, et sa courbe faisait tourner bien des regards. Elle et Emilie étaient les meilleures amies du monde et c’était parti pour durer.

 Ces gens la, Raoul les aimait, pas les aimait « bien », mais les aimait. Des amis soudés pour l'éternité, qu'on verrait facilement bras à bras comme sur les affiches de propagande soviétique ou dans une série de roman d’aventure-enquète d’un bibliothèque bleu, verte, jaune… Chacun avait sûrement commencé la vie dans son coin, mais le destin les avait réuni pour affronter les mêmes ennemis : un quotidien triste, une foule normalisée qui ne voudrait jamais d’eux, comme amis et comme ennemis. Discutant de la pluie et du beau temps, les cinq compères ne virent pas la sonnerie arriver, trop pris à se plaindre d'un vent sec et glacial causé en partie par le microclimat de la ville, tandis que tout le reste du pays croulait sous 1.50m de neige.

La France

était figée dans un hiver qui n’en finissait pas, sauf à Vierzon où il coinçait entre le plus haut froid et le dégel humide.

 

Réalisant finalement que la sonnerie avait sonné et dérangés par les badauds montant les escaliers, ils se remédièrent à grimper trois étages et à parcourir

50 mètres

de couloir empli de jeunes qui attendaient leur profs respectifs, vautrés sur le carrelage poisseux du lycée. Le Lycée Edouard Vaillant, classé 175ème dans le classement de l’Express, n’avait ni qualité ni défauts. Il était gris, mais pas sale, moche, mais pas délabré. L’intérieur ressemblait à l’extérieur, un infime effort de décoration a base de peinture beige et de mosaïque remplissait avec peine son rôle artistique. Eve s’arrêta devant sa salle de classe, un petit signe de tête vers les autres qui continuait leur route.

-J’ai rien pour vous les crevards, lâcha elle avec son cynisme de huit heure du matin a l’attention des traînes savates affalés le long du mur.

-On se voit à l’escalier, sale L ! , lui lança Sophie. La blague était récurrente. La grande punk lui tira la langue et se laissa tomber contre le mur, son sac à ses pieds, pendant que les quatre autre continuaient.

Arrivés devant la salle de leur cours de Géographie, les « intellos » se pressant devant, ils attendirent. Les quatre jeunes gens n’avaient pas remarqué la prof qui les suivait depuis toute la longueur du couloir. Mme Robert jeta à Emilie une tentative de regard méprisant du haut de ses 1.62m. Obligée de baisser la tête pour le lui rendre, Emilie renonça à la futilité du peu de plaisir sadique qu'elle aurait récolté dans l'entreprise. Il n’y avait que les profs pour espérer tirer un peu de plaisir à se sentir « au dessus des autres ». La prof ouvrit la porte, lâcha un "merde" étouffé, pour rassurer les jeunes dans leur idée de prof poli et imperturbable, et serra son sac contre elle. Elle referma la porte et se tourna vers ses élèves, l’air un peu dépitée. C’était une femme d’un certain age, qui cachait son regard vitreux derrière des lunettes pointues et un maquillage trop épais. Sa peau semblait pendouiller sur son corps filandreux comme du linge humide. Elle parla de sa voix couinante.

"Bon, on va aller salle 404, ils nous faut un lecteur DVD, dit elle de sa voix nasillarde.

-on va voir quoi m’dame ? demanda un rasta blanc d'une voix lasse.

-je parie sur Nuit et Brouillard, soupira pour elle Sophie.

-nan, on est dans l’constructivisme russe, commenta Nicolas.

-Le Cuirassé Potemkine, chef-d'oeuvre du cinéma russe des années 20, répondit la prof.

-Bien joué Nico.

-J’ai arrêté de compter, dit le grand blond.

-Oi, rajouta Raoul a leur intention pour leur dire de suivra le groupe déjà en branle le long du couloir.

-Genre t’es pressé.

-Pressé de dormir ouais !

Tandis qu'ils grimpaient un étage de plus, l'idée d'une séance de cinéma muet à

8h

du matin en plein hiver renferma tout le monde dans un calme rare.

 

La salle 404 servait pour le club de photo/vidéo/audio du lycée. Elle n'avait donc pas servi depuis 2 ans, le niveau des activités culturelles du lycée ayant atteint un point mort depuis l’incendie de la salle d’art plastique. Les élèves s'installèrent pour leur sieste dans un assourdissant fracas de chaises qu'on traîne. Les six s'installèrent comme toujours dans le fond, espérant un radiateur chaud. Espoir vain, comme toujours, le radiateur était d’un froid métallique à faire frémir un viking. Le film commençait, et déjà les esprits s’égaraient, a l’exception de certain captivé par un aspect précis du film. Ils étaient peu nombreux.

-Alors ta PS remarche ? demanda Sophie a voix basse, retournée vers Raoul et Nicolas derrière elle. Ils étaient dans le fond, le plus loin de la porte et du bureau de la prof.

-Mouais, je sais pas c’qu’elle nous a fait hier. Parla t’il. Sa voix portait un peu trop, et la prof lâcha un « chh » mécaniques, captivée par la lutte soviétique.

-Elle a trop chauffée je suppose, on l’a fait tournée tout le week-end, reprit Nicolas. Sa voix était assez discrète et pourtant il parlait clairement. Emilie se retourna à son tour.

-Vous avez joué a quoi pour que ça vous tienne tout le week-end ? demanda t’elle.

-Colossus, dirent en même temps Raoul et Nicolas.

-Il est si bien que ça.

-Ouais, même peut être plus. Rajouta Nicolas. Et toi, fini d’emménager ?

-Ouais, c’est bon, ça sent la poussière mais au moins j’suis chez moi, répondit Emilie.

-T’aurais pu prendre un truc sur Vierzon quand même Ça aurais pu faire un bon squatt, rajouta Raoul.

-Nan, y’a déjà ta baraque, et pis y’a rien d’autre a Vierzon. Continua Emilie

-Chh, ponctua la prof.

-Ça doit surtout être tranquille, personne doit venir t’emmerder, repris Sophie.

-Ouais carrément, maintenant j’ai plus qu’à savourer.

-Je sais pas comment tu fais, moi j’aurais tout claqué d’un coup.

-Toi tu t’habilles en rouge vif.

-Mais j’aime bien l’rouge.

-Ça on l’sait.

-ben zut.

-Taisez vous au fond, clama la prof. La classe ne ricana même pas, noyé dans une apathie rare et spécifique au cours d’histoire géo.

 

Tandis que le médecin constatait la présence de ver dans la viande des matelots, Raoul, plongé dans un ennui profond pareil à celui que l'on a tous connu durant les "plus belles années de notre vie", eu une idée. Une petite idée idiote et sans valeur dans l’hypothétique noosphère : La salle était munie de sorte de plinthe, a mi hauteur des murs, le long des tables. Elle dissimulait des prises et câbles réseau n'ayant jamais servis. Cependant, à l'aide d'une règle en plastique, on pouvait en décrocher le bord extérieur révélant une petite cavité et y placer un mot d'esprit ou mieux, un objet. Il était improbable qu’il trouve quoi que ce soit dans la salle abandonnée depuis quelques années, mais on ne sait jamais. Nicolas était absorbé par le film, Raoul ayant soupçonné chez lui des origines russes, il comprenait l’infime intérêt qu’il pouvait trouver dans le Potemkine.

 

Alors que l'ennui catatonique le quittait laissant place à l'excitation suscitée par l’acte anarchique et presque archéologique, Raoul saisit sa règle brisée à 14cm. Un petit remous de trousse et le silence a nouveau. Il glissa l'objet dans le fin interstice séparant la plinthe du mur et, se rappelant avec joie pourquoi il était en L, pour ne savoir que le strict nécessaire en physique et pouvoir se passer d’un double décimètre gradué, il appliqua ses connaissance mécaniques et le morceau de plastique de la plinthe se sépara pour retomber contre la table, merveille du levier, génie de Syracuse.

-Chh !

 La plinthe se décrocha aisément mais non sans soulever un petit nuage de poussière, qui dans la fine lumière filtrant à travers les stores médiocres du lycée, donnait un aspect magique a cette action inutile. Cependant, Raoul, qui espérait au max un petit mot "celui qui trouve ça est un con", se tourna vers Nicolas, assis a coté de lui, tandis que, alertés par le petit bruit, Emilie et Sophie s'étaient tourné vers lui, sans la moindre discrétion. Le cinéma expressionniste russe semblait absorber l’intégralité de l’attention de l’enseignante, en dépit de celle des élèves. Derrière la plinthe, une plus grande cavité était creusée dans le mur.

-Ça, c’est le truc stupéfiant !

-Tu m’étonnes John.

-Bon Jack, tu la fouilles ta « hatch » ?

La grotte avait juste la taille pour y passer une main, une grande main quand même. Dans le fond du trou était posé une cassette vidéo, sur la tranche. Raoul la saisit, il souffla sur l’étiquette en projetant un nuage de poussière blanche, découvrant une écriture ronde, bien proprette, indiquant…

La Rose

d'Airain » dit Raoul a voix basse et d'un ton monocorde.

-Du porno amateur de prof ? Espéra à voix tout juste haute Emilie

-J’espère pas…Sauf si y’a Berthier "répondit Raoul, finalement habitué à entendre ces sons de la voix charmante d'Emilie.

-C’est vrai que j’en ferait bien mon quatre heure de celle la, conclut elle. Emilie faisait rarement étalage de sa préférence pour la gente féminine, mais le professeur Berthier était vraiment une très belle femme.

La sonnerie retentit alors qu'un landau dévalait les marche d'une place quelconque de Russie (« Odessa ! ») sur l'écran sale de la télé. Probablement Odessa. La prof ralluma la lumière avec cette violence qui vous fait pleurer sans vous faire mal. Ce choc sortit Raoul de son hypnotisme devant la cassette. La pluie commençait à tomber dehors. Il neigeait partout sauf à Vierzon. Il pourrait presque se rassurer en se disant que c’était parce qu’il faisait « trop chaud ». Raoul se leva comme si il sortait du sommeil, un peu après tout le monde. Il rangea discrètement la cassette dans son sac quasi-vide et enfila son blouson. Les trois autres esquissèrent un petit sourire. Ils adoraient ce genre de plan que seul Raoul arrivait à dégotter. Sacs sur les épaules, ils sortirent tout les quatre et descendirent les quatre étages durement grimpés deux heures plus tôt.

-Si c’est un porno, on l’met sur You Tube dit Sophie naturellement.

-Non, ça sera censuré, commenta Nicolas.

-Pas si on l’intègre a une AMV « Advent Children/ Dir en Grey », rajouta Raoul.

-Ok, tu la fais, se moqua Emilie.

-Non ! clama Raoul, réalisant son erreur.

-On met ça sur Pornotube et personne ne fera d’AMV, termina Emilie.

-Faut encore trouver un magneto.

Ils acquiescèrent. Il arrivent sous le préau et s’assirent dans « leur coin », cette sorte de petit marchepied inutile, entre le rez-de-chaussée et le premier étage. Du haut des marches, Sophie vit Eve qui discutait avec une sorte de mini elle-même, un peu a part d’un groupe d’autres minuscules secondes. La petite blonde était emmitouflée dans des habits d’hiver.

-Eve !cria t’elle. La blonde platine se retourna et répondit de bref signe de la main « je finis avec elle et j’arrive ».

-Vous savez qui c’est cette petite blonde ?

-Luna Lovegood?

-Ouais, c’est Luna alertés.

-Vous avez pas les crocs vous ? demanda Emilie, pour relancer.

-alertés, il te faut combien mon amie ? Rigola Nicolas.

- si on me le demande, je dirai le monde répliqua elle, avant même que Nico finisse sa phrase.

-Prend moi un Schnikers dans le mouvement. Nicolas lui tendit un euro et la grande brune partit sans attendre dans la foule pressée du préau.

-Dieu te le rendra ! Répondit t'elle. Elle s’était retournée et bousculait les gens. Elle repartit de plus belle, dans le bon sens.

Raoul se leva et, regardant au loin, du haut des quatre marches, au dessus de la mer de lycéens humides, déclara d’un ton calme.

-J'vais à l'administration. Il sauta les quatre marches et traça entre les couples satisfaits, les groupes d’étude et les bandes de loubard membré. Sophie et Nicolas ne dirent un mot et échangèrent un regard de sitcom. Emilie se retourna en croisant Raoul et bouscula encore du monde, puis remonta. Eve l’accompagnait.

-Alors quoi ? demanda t’elle.

-Ben et toi ?

-Non, j’ai demandé d’abord.

-Relou a trouvé une cassette en salle 404.

-C’est sûrement du porno, dit Eve l’air blasé.


Publicité
Publicité
Commentaires
E
Etant de Vaillant, je ne peux pas ne pas de rapprochement avec des faits réels... En tout cas j'aurais pu faire la même présentation de l'établissement : sans particularité aucune.<br /> C'est aussi une description fidèle des escaliers, on retrouve même dans tes personnages des caractères propres aux membres de 'The Staircase', pas besoin d'être un génie pour s'en rendre compte :)<br /> J'ai rit à la mention de 'Nuit et Brouillard', la prof d'histoire géo nous l'a montré la semaine dernière -_-"<br /> Tant qu'à faire une review, mon radar à orthographe m'a dérangé pendant la lecture, pourtant fluide et agréable, je comprends pourquoi tu disais qu'il y avait un travail de titan ;)<br /> (Sans rancunes ^^)<br /> Ah oui, je voulais aussi dire que le coup de la cassette trouvée comme par hasard par Raoul est une coïncidence un peu... grosse? Comme par hasard il a l'idée farfelue de chercher derrière une plainte, et hop il trouve quelque chose. Mais bon, on verra bien comment cela évoluera par la suite.<br /> En tout cas le coup de la cassette ça fait très 'The Ring'(Version Japonaise, bien sûr)^^<br /> Bref, je poursuivrais ma lecture parce que ça me plait bien. <br /> N'y aurait-il pas un peu d'autobiographie là dedans ? (Non c'est pas vrai je suis pas en L --')<br /> Bon eh bien bonne continuation :)
La Rose d'Airain
  • Lecture Online du roman de Léon Dauvois, en quête d'un éditeur. Tout les textes présent sur ce blog sont la propriété de Léon Dauvois. Si vous trouvez sur un autre site le même contenu que sur ce site, veuillez m'en faire part. La Rose d'Airain est une œu
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité
La Rose d'Airain
Publicité